Souvent et de manière naturelle, un enfant vient en aide à un parent âgé en le représentant par exemple aux assemblées de copropriété, en remplissant avec lui sa déclaration de revenus, en rédigeant des courriers officiels ou des chèques. Une telle entraide rend, naturellement, bien des services et repose sur la notion juridique de « gestion d’affaire ». Mais elle n’est alors qu’officieuse. Il est donc préférable d’officialiser cette situation pour que les enfants secondant ainsi leur(s) parent(s) puissent agir à la fois en toute légitimité et en toute transparence, limitant ainsi, en principe, les conflits dans la fratrie, très fréquents comme chacun peut le constater.

Ainsi, le parent peut confier à l’enfant choisi, ou à un autre proche, une procuration générale qui permet à ce dernier de pouvoir accomplir de nombreux actes en son nom. Il est inutile de les lister car le pouvoir donné concerne l’ensemble des démarches et affaires de la gestion courante du patrimoine, des actes dits d’administration, de contrats d’assurance, de factures, etc. Il est recommandé pour donner à cette démarche un caractère officiel et non interprétable de passer par un notaire.

Mais attention, les procurations ne peuvent plus être utilisées dès lors que la santé mentale de la personne qui en est à l’origine se dégrade, voyant ses capacités s’altérer. A ce moment-là, les proches doivent demander au juge l’ouverture d’une mise sous tutelle, curatelle ou habilitation familiale. Toutefois, il est possible – et souhaitable – pour le parent âgé d’anticiper cette éventualité (toujours difficile à vivre dans une famille) et d’organiser, par avance et elle-même, sa propre protection au moyen du mandat de protection future.

En quoi cela consiste-t-il ?  Cette démarche permet à une personne de choisir par anticipation qui s’occupera de ses affaires, de son patrimoine lorsqu’elle ne sera plus en état de le faire elle-même. Cela permet de définir librement l’étendue et la nature de la mission qu’elle confiera ainsi.

Sécurité et liberté

Ce mandat de protection future cumule deux avantages majeurs, par ailleurs souvent opposés : la sécurité et la liberté. Sécurité car il permet d’anticiper et d’organiser sa vie future, de le faire en pleine conscience et de se prémunir contre les abus de faiblesse. Liberté, parce qu’il permet de décider soi-même de son avenir.

Autre avantage, en l’absence de descendance directe, le mandat de protection future permet de désigner une personne de confiance parmi son entourage familial (neveu, nièce, filleul ou autre…) ou, en cas de relations familiales conflictuelles, de désigner un mandataire professionnel extérieur pour s’assurer une gestion neutre de ses affaires.

Pour que le mandat de protection future soit « enclenché », la personne à protéger doit  clairement être « dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté », comme le précise l’article 425 du Code civil.

Il est important de rédiger assez tôt son mandat de protection future, c’est-à-dire avant la perte de sa lucidité ou de ses capacités. Le mandataire – celui qui reçoit et exerce le mandat – dispose d’un pouvoir important et la difficulté, pour lui, réside souvent dans le choix du bon moment, celui où le besoin de protection se fera sentir. Il est donc important pour lui d’être vigilant et ne pas hésiter à demander l’avis d’un médecin habilité à établir des certificats médicaux circonstanciés (le greffe du tribunal dispose d’une liste de ces professionnels) ; c’est lui qui dira si le temps est venu ou non d’actionner le mandat de protection future. Attention, ce médecin ne peut être le médecin traitant.

Comment obtenir un mandat de protection future ? En pratique, il est possible de le rédiger soi-même ; il existe en effet un formulaire-type (Cerfa n°13592*04), accompagné de sa notice d’information. Toutefois, il est fortement recommandé de faire appel à un notaire. Les droits d’enregistrement sont inférieurs à 150 € et cela offre la possibilité de confier davantage de pouvoirs au mandataire, lui permettant par exemple de vendre des biens immobiliers, de placer des capitaux, etc. Le mandat de protection future signé sera alors un acte « dormant » tant que les capacités de la personne ne seront pas affectées. Il est important de savoir que cet acte est révocable à tout moment.

En dépit de ses nombreux avantages, ce dispositif reste peu utilisé :  moins de 20 000 mandats sont ainsi signés chaque année, c’est-à-dire beaucoup moins, proportionnellement, qu’en Belgique ou au Canada où un tel système existe également.  Pourquoi ? Sans doute parce qu’il est mal connu. Sans doute aussi parce que, s’il est par exemple courant d’anticiper ses propres obsèques, il se révèle psychologiquement plus difficile d’appréhender sa propre dépendance. Mais ce n’est pas parce qu’on l’anticipe qu’elle surviendra : c’est le principe de l’assurance !

Crédit Photos : photobyphotoboy

Focus

Trois mesures de protection

La décision d’une mesure de protection juridique revient au juge. Elle consiste à désigner une tierce personne pour aider la personne en perte de capacités et d’autonomie à protéger et gérer ses intérêts, prendre des décisions à sa place, parfois à les autoriser et à les contrôler.

Il existe 3 mesures principales pouvant ainsi être mises en place :

  • La sauvegarde de justice: dans ce cas, la personne protégée conserve la capacité d’accomplir tous les actes mais certains jugés spécialement importants (vente d’un bien immobilier, conclusion d’un prêt d’un montant élevé…) peuvent être spécialement confiés à un mandataire qui agira à sa place et en son nom.
  • La curatelle: la personne protégée peut effectuer les actes de la vie courante, comme la gestion de ses biens mais elle doit être assistée dès lors qu’elle veut les vendre ou en acheter d’autres.
  • La tutelle: la personne protégée ne peut pas gérer seule ses biens et son patrimoine. Elle est assistée systématiquement par un tuteur pour tous les actes (administratifs ou autres) qui engagent son patrimoine d’une personne, pour le présent ou l’avenir (vente d’un bien, conclusion d’un emprunt, donation).
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